Audi et première classe pour le recteur
Le chef de l’Université de Montréal touche aussi un salaire près de trois fois plus élevé que la ministre.
Rutilant VUS hybride Audi et vols en première classe: malgré une dette record de 166 M$, l’Université de Montréal rembourse à son recteur Guy Breton des dépenses qui sont loin de rimer avec austérité.
M. Breton fait partie des recteurs qui ont dénoncé haut et fort le manque de financement des universités.
«Tous les Québécois» ne prennent pas «les moyens disponibles pour financer adéquatement nos universités», a-t-il lancé devant les élus du Québec en 2013.
En vertu d’une demande d’accès à l’information sur ses allocations de dépenses, il apparaît que le recteur bénéficie de conditions plus qu’enviables, en plus d’exiger le remboursement d’une foule de dépenses loin d’être toujours nécessaires à ses fonctions.
Le recteur touche un salaire presque trois fois plus élevé que celui de la nouvelle ministre de l’Enseignement supérieur du Québec, Hélène David. Elle-même issue de l’UdeM où elle était vice-rectrice aux affaires académiques, avant d’être élue avec le Parti libéral dans Outremont, Mme David gagne aujourd’hui 158 988 $.
Clause ressourcement
Le recteur Breton a aussi droit au controversé congé de ressourcement qui lui permettra, après son mandat, de recevoir un an de salaire équivalant à la rémunération de sa dernière année. Ce congé est accordé afin de se «ressourcer» pour rediriger sa carrière.
L’Université a reconduit son mandat, car il a notamment fait rayonner l’UdeM en améliorant son classement dans les meilleures universités au monde.
Ce n’est donc pas étonnant si le recteur voyage aux quatre coins du monde. Il a cumulé des dépenses de 65 000 $ depuis son arrivée.
Ce qui est plus étonnant, c’est que le recteur a le droit de voyager en classe affaires, ce que Québec ne paie pas à ses hauts fonctionnaires.
L’UdeM nous a expliqué que la classe affaires était payée lorsque le recteur «avait une activité peu de temps après son arrivée à destination». Les horaires «sont très chargés» et il importe de «maximiser le déplacement», ajoute l’UdeM.
Lexus et Audi
Lorsqu’il voyage sur la route, le contrat d’embauche de M. Breton prévoit une voiture et un chauffeur messager à sa disposition.
L’UdeM lui a ainsi fourni un VUS Lexus de 2012 à 2014 au coût de 855 $ par mois et, depuis 2014, un VUS Audi Q5 hybride coûtant 862 $ mensuellement.
L’UdeM explique qu’il est plus «économique de payer un véhicule pour le recteur et les vice-recteurs que de rembourser les frais de déplacement».
Le véhicule n’est pas utilisé pour des fins personnelles, mais pour des «rencontres professionnelles».
«Nous souhaitions obtenir un véhicule hybride qui pouvait transporter confortablement quatre personnes pour des voyages à Québec et qui possède une traction intégrale. Le Q5 (Audi) est moins dispendieux que le Lexus que l’UdeM utilisait avant», nous a-t-on répliqué.
Le recteur Guy Breton n’a pas voulu nous accorder une entrevue. C’est le service des communications de l’UdeM qui a plutôt répondu à toutes nos questions de façon très transparente.
Qui est Guy Breton?
- Le Dr Guy Breton est recteur de l’UdeM depuis 2010 et sera à la tête de l’établissement au moins jusqu’en 2020.
- Il a commencé à enseigner à l’Université en 1979 avant de gravir les échelons: d’abord comme directeur du Département de radiologie, ensuite comme vice-doyen, vice-recteur et finalement recteur.
- Il a été un acteur-clé dans le projet du nouveau CHUM.
- Notamment décoré par l’Ordre du Canada, le gouvernement français et l’Université de sciences politiques et de droit de Chine, M. Breton siège aussi à de nombreux conseils d’administration, dont celui du 375e anniversaire de Montréal.
Recteur ou docteur?
Le recteur Breton ne voyage pas seulement pour faire rayonner son université, selon les documents obtenus. Il le fait aussi pour sa formation professionnelle.
Par exemple, il s’est rendu à Chicago et en Californie pour deux voyages en lien avec l’exercice de la médecine, même s’il ne pratique pas la médecine durant son mandat de recteur.
Les deux voyages s’élèvent à 8904 $ au total, dont 589 $ pour un surclassement en première classe. C’était pour une conférence sur la radiologie à Dana Point, en Californie.
Cotisations
L’UdeM réplique que le contrat du recteur prévoit le remboursement de formations professionnelles.
D’ailleurs, même si l’UdeM a mis fin à la collaboration de M. Breton dans sa clinique de radiologie, il a tout de même pu se faire rembourser 12 658 $ entre 2011 et 2015 pour toutes sortes de cotisations liées à la pratique de la médecine et de la radiologie.
L’Université lui a ainsi remboursé ses cotisations au Collège des médecins, à la Société française de radiologie, au Conseil des médecins, dentistes et pharmaciens du CHUM, à l’Association médicale du Québec et au Collège royal des médecins chirurgiens du Canada.
L’UdeM explique que M. Breton a le titre de professeur et que, pour le conserver, il doit garder ses titres professionnels. Soulignons qu’il n’a aucune charge de cours.